L’influence des genres dans le design

Chez CBA, nous nous sommes posés la question de l’influence des genres dans le design.

À l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes, nous avions donné la parole aux femmes qui font vivre le design chez CBA. Aujourd’hui, nous avons souhaité aller plus loin en nous posant la question de l’influence des genres dans le design. Et oui, si le design avait un genre, quel serait-il ? Les influences féminines et masculines diffèrent-elles tant que ça ? Et quel en est l’impact final, sur la société, sur les usages ?

Depuis toujours l’homme a une place importante, voire dominante dans le monde du design, en écho de sa place dans la société. Bien que certaines artistes féminines soient sorties du lot, en proposant des créations innovantes, et ce particulièrement pour leur époque, les architectes et designers les plus connus restent pour la plupart des hommes. Ainsi, la majorité des produits et services que nous utilisons au quotidien ont été créés par ces messieurs.

 
Ayant toujours eu le monopole, on peut se demander s’ils se posent les mêmes questions que les femmes. En matière d’ergonomie, de sécurité etc. les hommes et les femmes n’ont pas la même expérience de vie, n’ont pas la même culture et, souvent, pas la même éducation, sans parler des différences biologiques.

Et si ces expériences avaient une influence sur le design final et sur la société ?

L’impact de l’influence masculine est tel que l’on trouve encore aujourd’hui des produits et services adaptés principalement au genre masculin.

À titre d’exemple, parlons voiture : même si moins concernées par les accidents de la route, les femmes auraient 47 % de risques en plus d’être grièvement blessées, 71 % de l’être légèrement et 17 % plus de risques de mourir que les hommes.**  

La raison ? Les mannequins de crash test ont pendant longtemps été établis sur des carrures masculines. De ce fait, la conception des ceintures et des airbags ne prenait pas en compte la différence de masse et de répartition musculaire entre les hommes et les femmes ; ce qui peut être fatal pour ces dernières.

L’automobile n’est pas le seul secteur où le genre a un impact sur la société. Il en va de même pour les meubles et l’architecture en général. En 1945, l’architecte Le Corbusier conceptualise le Modulor, silhouette universalisée permettant de concevoir la structure et la dimension du mobilier. Seulement cette silhouette est imaginée sur une carrure masculine d’un mètre quatre-vingt-trois, ce qui est loin des standards féminins, dont la taille moyenne équivaut à un mètre soixante.

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 Un autre exemple, plus récent : la tendance actuelle est aux écrans de smartphones supérieurs à 4 pouces, afin de profiter au maximum des contenus multimédia. Cependant, selon une étude menée par le cabinet Strategy Analytics*, les femmes elles, préfèreraient un écran plus petit, d’environ 3,5 pouces ; une logique d’ergonomie, sachant que la plupart des femmes ont des mains plus petites que les hommes.

Mais ne vous y méprenez pas, les designers n’ont pas tous imaginé des produits adaptés uniquement au genre masculin.
Pour ne citer que lui, Henry Dreyfuss, l’un des précurseurs du design inclusif, avait pour projet de placer l’utilisateur au centre de ses conceptions. “Gardons à l’esprit que cet objet auquel nous travaillons va être utilisé par les gens, individuellement ou en masse“ disait-il. Considérant qu’un projet de design doit pouvoir intégrer toutes les exigences sociales, éthiques, esthétiques et pratiques, il publie en 1955, un ouvrage intitulé « Design for people ».

 
Il ne fût pas le seul : de nombreux autres designers masculins font preuve d’innovation en matière de design. Victor Papanek, designer précurseur de l’éco-design, a consacré sa vie à la promotion d’un design responsable pour la planète et la société.  En parlant de société et d’inclusion, saviez-vous, par exemple, que certains produits de la vie de tous les jours, étaient au départ designés pour des personnes handicapées ? C’est le cas de la télécommande, une idée de Robert Adler, qui devait être destinée aux personnes alitées incapables de se déplacer pour pouvoir changer de chaîne.

Alors oui, le design peut aussi être pensé, au-delà du genre, de façon inclusive et utile.

En matière de design, comme en matière de marketing, on retrouve pour la plupart des produits, une séparation : il y a ceux destinés « aux hommes », et ceux « pour les femmes ». 

On observe la même chose avec le fameux : “rose pour les filles, bleu pour les garçons”. D’où cela vient-il ? Saviez-vous qu’il y a quelques siècles, le rose était la couleur des garçons ? En effet, depuis l’antiquité, la couleur rose était plutôt attribuée aux hommes, car elle était considérée comme une sous-couleur du rouge, qui à l’époque, symbolisait le pouvoir, l’autorité et la guerre. Le bleu lui, a pendant longtemps été la couleur que l’on attribuait aux femmes, en référence au manteau bleu de la vierge Marie : il symbolisait la pureté. 

C’est à la fin du Moyen-Âge que cette mode s’est inversée, avec la réforme protestante, le bleu est devenu symbole des dieux et de la force, et le rouge devient le symbole de l’amour et de la féminité. C’est au 18e siècle que la marquise de Pompadour, qui s’était entichée de cette couleur, l’aurait rendue à la mode dans l’habillement mais aussi en décoration, ce qui aurait rendu le rose populaire pour les femmes.

Mais finalement, cette classification des genres définit-elle vraiment le design ? Pas nécessairement.
Nous avons pu constater que les modes, les influences changent, au même rythme que la société évolue. Les influences féminines et masculines sont propres à tout un chacun, en fonction de son expérience personnelle. Il n’est plus question de séparation des genres. 

Depuis quelques temps, la mode est au « no gender », et de plus en plus de marques investissent ce créneau. Cette tendance est influencée par l’évolution des codes de la société : selon une étude publiée par l’agence de publicite Bigeye, la moitié de la génération Z et 56% des millenials pense que la valeur binaire de genre est dépassée.

En conséquence, de plus en plus de marques décident de s’aligner sur cette tendance : de nombreux jouets deviennent non genrés, avec des couleurs neutres afin de sortir de cette dichotomie restrictive. Il en va de même pour le secteur de la mode ou des cosmétiques où un certain nombre de collections se font unisexe.

Une jeunesse plus « gender neutral » et pourquoi pas plus libre, dans ses choix et ses propres influences.

Ainsi, les stéréotypes sociaux se déconstruisent un à un. L’inclusion et la compassion ne sont pas qu’une affaire de femmes, la logique et la raison ne sont pas qu’une affaire d’homme. Ce n’est pas le genre mais l’expérience et l’approche qui vont créer le design ; et ce sont surtout les gens, les personnalités, les époques, les visions et le génie de chacun qui permettent le progrès.

**Source Le Telegramme  

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